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Belgium Stripped Bare
En avril 1864, Baudelaire quitte Paris pour Bruxelles avec une sorte de naufrage dans son sillage : son œuvre majeure, Les fleurs du Mal, a été condamnée et censurée dix ans plus tôt, beaucoup de ses autres œuvres sont épuisées et il a mis en gage ses précieuses traductions de Poe pour gagner l'argent dont il a tant besoin pour survivre. Craignant d'être emprisonné pour dettes, le poète qui était un paria à Paris le deviendrait bientôt à Bruxelles. Peu de temps après son arrivée, des rumeurs se répandent selon lesquelles il serait un espion chargé de surveiller les exilés républicains pour le compte de la police française.
C'est en découvrant une ville pestiférée en plein réaménagement, et après avoir échoué à trouver un éditeur pour son travail, que Baudelaire a commencé à rédiger des notes pour son projet de livre sur la Belgique. Dans son catalogus rerum de Bruxelles et des Belges, l'état général qui domine est celui de la fadeur et de la dissolution : avec des observations allant de celles d'un sociologue à celles d'un anthropologue, d'un urbaniste et d'un esthète, à travers l'œil fugitif de Baudelaire, nous assistons à son examen de la physionomie, des coutumes culturelles et politiques, de la peur de l'annexion de la Belgique par la France, et plus encore. Considéré comme un livre mesquin, voire xénophobe par des personnalités comme Derrida, Baudelaire lui-même en parle comme d'une esquisse et d'une satire qui a le double avantage d'être une caricature des folies de la France et un simulacre d'État démocratique.
Alors qu'il tente d'achever son projet sur la Belgique ainsi que d'autres travaux, Baudelaire est victime de violentes crises de névralgie, puis, au début de l'année 1866, de nouvelles crises, de vertiges et de nausées. Après une attaque cérébrale, il reste hémiplégique et muet.
Dans ce véritable examen complet de tous les aspects de la vie en Belgique, l'œil perspectif de Baudelaire saisit un monde en un coup d'œil. La pléthore de notes du poète et sa vaste collection de coupures de presse (résumées ici) nous révèlent les rouages de son esprit, ce que Blake appelait l'atelier infernal de l'artiste. La Belgique mise à nu est une litanie esthético-diagnostique d'observations souvent vitrioliques dont la victoire se trouve dans l'acte d'analyse lui-même, dans l'ivresse du diagnostic, tout comme les grands comiques exultent dans des observations caustiques et mordantes de la société, une gifle au visage du statu quo.
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Dernière modification: 2024.11.14 07:32 (GMT)